Fossiles

Un autre âge a vu naître ces formes mystérieuses, prémices d’une exubérance végétale aujourd’hui disparue.

On les imagine traversant les siècles au milieu des forêts primaires, brûlées par le feu des volcans ou immergées sous les océans inondant le monde.
Délaissées par les pousses parfois gigantesques qui les habitaient, les lichens ont peu à peu colonisé ces coques vides et leur ont redonné vie, les habillant peu à peu de textures variées et de couleurs vives comme un voile d’immortalité.

Elles gardent la douce rondeur des bols raffinés que je produisais jusqu’à présent mais leur surface est désormais animée de stries mouvantes et rythmées évoquant les nervures végétales et la puissance de la vie terrestre.

Bien plus qu’une simple opposition, ce nouveau travail s’est imposé comme l’exploration d’un autre monde, d’une autre part de moi-même, par l’expression d’une force intérieure instinctive, primitive, tellurique et solitaire, produite par le feu et la fumée des cuissons raku.

 


 

Les Fossiles sont constitués de blocs d’argiles finement striés puis longuement étirés, parfois jusqu’à la déchirure, évoquant ainsi la finesse mais aussi la dureté de la paroi végétale pétrifiée par le temps, ultime empreinte et souvenir d’une existence terrestre.

Les plaques obtenues sont assemblées sur des formes puis repoussées de l’intérieur pour obtenir les volumes souhaités, coques, bulbes ou rhizomes géants…, fragmentés comme des strates géologiques bouleversées par de violents cataclysmes.

Après séchage, des engobes et des pigments variés sont appliqués en plusieurs couches pour obtenir les tons vibrants et multicolores des lichens qui recouvrent peu à peu les fossiles d’une nouvelle peau.

Enfin, la cuisson raku et l’enfumage animent ces derniers en patinant les couleurs et en introduisant le noir de la fumée comme élément de contraste, apportant ainsi une dimension volontairement dramatique aux œuvres.

Ainsi se révèlent la beauté, la profondeur, l’oubli et le souvenir, mais aussi l’obscurité et le chaos du monde où la vie malgré tout reste éternellement victorieuse.

 

Parcours

J’ai commencé la céramique pendant mes études d’architecture.
Le tournage s’est d’abord imposé à moi comme une évidence, un moyen de faire naître de mes mains une forme dans le mouvement.

La vie bouillonnante de l’atelier, de belles rencontres et l’envie croissante de création ont peu à peu orienté cette activité en un choix de vie définitif.

Les voyages successifs au Japon et la découverte des grands centres de céramique ont largement influencé mon travail, à travers l’objet utilitaire dans un premier temps, et plus récemment dans des œuvres sculpturales en raku.

La dualité est devenue une donnée essentielle de mon travail : l’équilibre dans le mouvement, la pureté des lignes et la richesse de la matière, le raffinement de l’objet utilitaire et la puissance instinctive de l’objet unique.

Céramiste à Paris depuis 2003, j’enseigne le tournage du grès et de la porcelaine, et j’anime des stages de cuisson raku avec mes élèves en Normandie.

Mes travaux sont présentés chaque année dans des expositions collectives à la galerie Hayasaki
(Paris 4e).